La Directive sur la Distribution Assurance (DDA) entrera en vigueur en France au plus tard le 23 Février 2018.
Elle succède à la Directive Intermédiation en Assurance du 15 Décembre 2005 (d’après la directive européenne du 9 Décembre 2002).
Elle s’inscrit dans un souci de protection renforcée des consommateurs en réorganisant en profondeur la pratique de la distribution des produits d’assurance dans toute l’Europe.
Ce texte traduit aussi l’extension notable de son champ d’application non plus aux seuls intermédiaires d’assurance mais bien à toute la chaîne de distribution d’assurances.
Concrètement, les changements apportés par cette directive imposent plus de transparence dans les pratiques commerciales des professionnels de l’assurance.
Que faut-il retenir de cette DDA ?
Les principaux chantiers de cette DDA, dont les dispositions structurantes des textes seront rendues au cours du 1er semestre 2017, sont les suivants :
A/ La surveillance des produits et les accords de gouvernance (POG, article 25, DDA) :
Grande nouveauté de cette DDA, le « POG » (Product Oversight and Governance) introduit de nouvelles obligations partagées en matière de gouvernance et de surveillance des produits d’assurances.
L’objectif est d’imposer un contrôle régulier par les compagnies d’assurance que les produits qu’ils conçoivent et/ou commercialisent :
- répondent au mieux des besoins et intérêts des clients ;
- sont en adéquation par rapport aux marchés cibles qu’ils auront définis ;
- tout en évaluant tous les risques pertinents qui y sont associés ;
- et en déterminant une stratégie de distribution cohérente avec des mesures raisonnables pour que les produits soient effectivement distribués aux marchés cibles.
Au-delà de ces points, la DDA exigera en plus, une adéquation continue entre l’offre produit et les demandes de la clientèle définie.
B/ La gestion des conflits d’intérêts (articles 27 et 28, DDA) & les incitations (article 29, DDA) :
Un autre durcissement des règles instaurées par la DDA porte sur la gestion et la prévention des conflits d’intérêt. Les situations potentielles de conflit d’intérêt devront désormais être décrites dans une politique qui sera révisée tous les ans. Cela permettra de mettre en œuvre des mesures de prévention et de surveillance par rapport à la politique définie.
En ce qui concerne l’incitation à souscrire une offre, elle devra respecter deux principes :
- l’obligation d’agir au mieux des intérêts du client,
- ne pas nuire à la qualité du service rendu.
La DDA stipule que, pour chaque contrat, le distributeur devra communiquer :
- L’existence d’une participation directe ou indirecte dans le capital d’une entreprise d’assurance.
- S’il est soumis à une obligation contractuelle de travailler avec une ou plusieurs entreprises d’assurance,
- S’il perçoit des honoraires, des commissions ou/et des avantages économiques, le montant des honoraires payés par le client ou la méthode de calcul des honoraires ainsi que le mode de rétribution (éventuellement incitatif) de son personnel.
Par ailleurs, les intermédiaires devront clairement présenter la nature et les modalités de leurs rémunérations.
C/ L’évaluation de l’adéquation et du caractère approprié, et les informations des clients (article 30, DDA) :
En renfort du devoir de conseil, la DDA oblige les distributeurs de produits d’assurances à transmettre à leurs clients, avant la signature du contrat, un « PID » (Product Information Document). Ce document standardisé donnera aux clients toutes les informations objectives sur les caractéristiques principales du produit, de façon claire et compréhensible, afin de lui permettre de prendre une décision en toute connaissance de cause.
En conclusion de cette synthèse :
La DDA impose ainsi un devoir de conseil renforcé, toujours dans les meilleurs intérêts des clients. Le distributeur d’assurances devra être en mesure de prouver que les besoins des clients sont parfaitement pris en compte. Le corolaire implique que l’assureur ait fourni les bons supports de formation à ses collaborateurs, qu’il ait communiqué les bonnes informations à ses partenaires…
Il en découle directement une obligation de formation continue des différents acteurs de toute la chaîne de distribution en assurances, également précisée dans la DDA.
Cela souligne, en parallèle, l’évolution nécessaire des outils informatiques de gestion et de décision pour contrôler, sur l’ensemble de la chaine, la traçabilité des informations à délivrer. Et ceci, malgré l’externalisation d’une partie de cette chaine et les nombreuses parties prenantes.
Les liens entre les différents acteurs de cette chaine vont donc inévitablement devoir se renforcer, et ce, à travers toutes les étapes de la vie d’un contrat (conception, vente, suivi…), pour répondre à ces nouvelles réglementations en matière de distribution et de partage des responsabilités.
Du côté de l’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution (ACPR), l’analyse des chaines de distribution des acteurs multi-casquette (courtiers-grossistes, distributeurs mandataires) se poursuit pour voir s’il y a matière à conflits d’intérêt et pour que la valeur ajoutée de chaque partie prenante soit clairement identifiée (point également mentionné par l’EIOPA[1] dans le questionnaire aux professionnels qu’elle vient de publier en vue de la préparation des actes délégués).
En ce début 2017, un certain flou règne toujours quant au coût et à la durée nécessaire pour une mise en conformité globale de la chaine de distribution. Il apparait que 50% des travaux et de la charge totale seront absorbés en 2017 (source : Sia Partners).
Mais des voix se font entendre, notamment sur la crainte d’une surtransposition de la directive européenne dans le droit français. Les inquiétudes portent sur une potentielle dérive en termes d’exigences alors que la modification du cadre réglementaire est déjà lourde et limitée dans le temps (cf. vote de la commission des affaires européennes du Sénat du 19/01/2017).
Il est intéressant de noter que, dans le cadre de la DDA, le modèle économique français de rémunération des intermédiaires d’assurances par un système de commissions a longtemps été remis en question. Ce n’est que le 30 Juin 2015 qu’il a été autorisé et donc sauvé suite aux échanges entre le Conseil, le Parlement et la Commission européennes.
Dans le même temps, la Chambre Syndicale des Courtiers d’Assurances (CSCA) bataille pour le maintien des spécificités économiques et sociales du courtage français, et demande un report à fin 2018 de la DDA étant donné le délai court de mise en œuvre des textes.
La réponse d’IGA :
IGA, en tant qu’éditeur et partenaire de nombreux acteurs sur le marché de l’assurance, s’intéresse de près aux évolutions réglementaires pour faire évoluer ses solutions en conséquence. Nous faisons évoluer nos progiciels en anticipant les futures obligations de nos clients pour que le moment venu, ils puissent devancer ces nouvelles exigences.
A un an de l’échéance de la transcription de la DDA dans le droit français, nous travaillons en étroite collaboration avec nos clients dans ce sens.
Même si le périmètre complet de cette directive de distribution assurance n’est pas encore complètement défini, nous sommes déjà en train d’intégrer les premières fonctions et modules permettant de répondre à ce nouveau cadre réglementaire.
Les domaines concernés sont par exemple :
- Les outils extranets et portails collaboratifs amont / aval :
– Gestion et archivage des PID
– Signature de documents émis et reçus au sein de la chaine Compagnie – Courtier – Client final - Les fonctions de workflow et de contrôle associés :
– Pour garantir l’exécution des actes de vente et de gestion par les gestionnaires en conformité avec les règles définies (respect des étapes, vérification de l’existence des documents attendus, comme pour une souscription) - Moteur de règles de contrôle et de calcul sur les commissionnements :
– Pour permettre la mise en place, la maintenance, et la publication de politiques de commissionnement plus fines, plus claires, et respectueuses des obligations à venir
Mais les obligations qu’instituent la DDA ne reposent pas de la même manière sur les différents canaux de distribution. Lorsque qu’il n’y a pas d’intermédiaire, les obligations de recueillir les besoins du client pèsent sur les porteurs de risque. Dans le cadre d’agents généraux ou de mandataires par exemple, ces obligations leur incombent et doivent être respectées grâce à des outils informatiques ou documents papiers mis à disposition par les compagnies d’assurances.
Plus précisément : sur le plan applicatif, IGA peut satisfaire aux obligations de la DDA lorsque le distributeur d’assurances (essentiellement les courtiers avec délégation de souscription) voit peser sur lui l’obligation de :
- Recueillir les besoins du client,
- Formuler une offre d’assurance correspondant à ses besoins (proposition au sens du Code des Assurances) et non une simple offre commerciale de prix,
- Annexer au contrat ou à l’avenant du contrat ce recueil des besoins et la proposition engageant juridiquement l’assuré et le porteur de risque.
Les dates importantes :
30 Juin 2015 : trilogue intervenu entre le Parlement, le Conseil et la Commission européenne.
24 Novembre 2015 : vote européen de la loi sur la Directive sur la Distribution Assurance (DDA).
2 Février 2016 : publication de la loi sur la DDA au Journal Officiel de l’Union Européenne.
20/07 au 20/10 2016 : ouverture d’une consultation publique de l’EIOPA sur les actes délégués envisagés
Février 2017 : L’EIOPA rend son avis à la Commission sur les actes délégués.
23 Février 2018 : Date butoir de transposition de la DDA dans le droit français.
[1] EIOPA : European Insurance and Occupational Pensions Authority